Ray
Davies, le retour du "tordu"
Dans
l'automobile, Ray Davies s'improvise guide du Nord londonien : ici, une maison
où vécut le poète William Blake, là, le cimetière de Highgate où gît Karl Marx,
plus loin l'école d'art où lui-même, démiurge des Kinks ("les
tordus"), s'exerça à la peinture. Qui mieux que le chanteur, guitariste,
et surtout auteur-compositeur d'un des grands groupes de rock britannique,
connaît ce secteur ? Chroniqueur acerbe du déclin de l'Empire britannique,
portraitiste incisif des excentricités de ses habitants, Ray Davies est resté
attaché au quartier de son enfance, ce Muswell Hill qu'il a dépeint en 1971
dans l'album Muswell Hillbillies.
Après
treize ans de silence discographique, le supporteur du club de football
d'Arsenal publie un nouveau disque, Other
People's Lives, enregistré au studio Konk, lieu du rendez-vous. « Il appartient aux Kinks, explique-t-il. Seul mon frère (le guitariste Dave
Davies) n'y met plus les pieds. Nous
avions fait surtout des singles et nous voulions expérimenter des idées. Il
nous fallait un endroit pour nous fixer. Autrefois, les amis venaient, il y
avait un bar et un club bon enfant. C'était l'utopie d'une communauté musicale »
rêvée dans le chef-d’œuvre Village Green
Preservation Society (1968).
Longtemps
isolationniste, le musicien a cette fois traversé l'Atlantique pour renouveler
son inspiration. « J'ai choisi La
Nouvelle-Orléans parce que le jazz est la première musique qui m'a inspiré. J'y
ai aussi découvert un rap, plus musical qu'ailleurs en Amérique, parce qu'il se
danse. J'ai commencé le projet en 1998. L'écriture a rapidement pris le pas sur
l'enregistrement : à l'arrivée, j'avais 48 chansons, je n'en avais jamais eu
autant dans ma vie. »
Comme
tout rocker britannique, Ray Davies entretient un rapport conflictuel avec les
Etats-Unis. « Ils nous ont apporté
le meilleur et le pire, observe-t-il. Le
pire, c'est cette machine de guerre, et le meilleur, la musique. La culture des
Kinks vient du blues et du rhythm'n'blues. A nos débuts, nous jouions quantité
de reprises de Howlin'Wolf et de John Lee Hooker. »
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